Dès ce vendredi 27 octobre, dans son édition digitale, La Meuse Liège nous apprend que « Les membres liégeois du mouvement d’extrême-droite Nation prévoient une manifestation contre l’immigration lundi soir sur la place Saint-Lambert. », ajoutant que Nation invite les Liégeois via les réseaux sociaux à participer à une manifestation contre l’immigration. On n’en lira pas plus, l’édition étant payante.
Le lendemain, La Meuse remet le couvert dans sa version papier :
« Depuis quelques jours, Nation, le mouvement d’extrême-droite, invite via les réseaux sociaux les Liégeois à participer lundi soir à une manifestation contre l’immigration, au départ de la place Saint-Lambert. Une réponse à la campagne « Liège, ville hospitalière », qui devrait voir la création d’un groupe de travail chargé de se pencher sur la question de l’accueil des migrants.
Une étape supplémentaire, après la distribution de tracts dans de nombreuses boîtes aux lettres de la Cité ardente, qui n’a pas échappé aux mouvements anti-fascistes de la Cité ardente, qui ont commencé à mobiliser leurs troupes également en vue d’une contre-manifestation.
Ce lundi, deux rassemblements, aux ambitions opposées, pourraient donc se dérouler à proximité de la place du Marché, malgré l’interdiction promulguée par les autorités liégeoises.
La tension risque donc d’être palpable aux alentours du Perron lundi en fin de journée. D’autant que quelques mots malheureux lâchés sur les réseaux sociaux ont quelque peu mis le feu aux poudres. L’emploi du mot « torgnole » par un opposant a en effet donné du grain à moudre à Nation, qui a riposté : « Les gauchos attachés à la liberté d’expression veulent nous coller des torgnoles lundi à Liège ? Allez-vous les laisser faire ? ». Le ton est donné et laisse peu croire à un dénouement pacifique à la rencontre entre les deux mouvements.
Du côté de la police de Liège, on précise d’emblée que la manifestation de Nation n’a pas été autorisée, « parce que la demande a été introduite hors délais et qu’elle risque en outre d’occasionner des troubles de l’ordre public vu le risque de contre-manifestation. » Et qu’une présence policière sera de toute façon assurée lundi pour veiller à ce que ce rassemblement interdit n’ait pas lieu. Une précaution qui ne sera peut-être pas inutile en l’occurrence…
Geoffrey Wolff
Décortiquons cet article :
– « la distribution de tracts dans de nombreuses boîtes aux lettres de la Cité ardente »
=> fait paraître Nation comme un parti qui a un potentiel de promo qu’il n’a pas (seuls deux ou trois militants distribuent des tracts, à chaque fois dans quelques rues à peine)
– « deux rassemblements, aux ambitions opposées, »
=> aucune référence aux dites ambitions, mise dos à dos des fascistes et antifascistes, alors que notre appel est pourtant large, annoncé publiquement avec distribution de soupe et musique, pensé de façon à permette à toutes et tous, de tous âges de s’y sentir bien. Y faire référence désserverait la volonté de buzz, de faire croire aux lecteurs et lectrices que ce genre de rassemblement serait d’office dangereux ! Entretenir le fameux « sentiment d’insécurité »
– « La tension risque donc d’être palpable »
=> n’y allez pas !
– Donne, uniquement, la parole à Nation, les laissant se victimiser : « Les gauchos attachés à la liberté d’expression veulent nous coller des torgnoles lundi à Liège ? Allez-vous les laisser faire ? ». Cela est basé sur un mot qui aurait été vu dans un commentaire facebook par Nation. Que SudPresse laisse faire référence à un commentaire parmi tant d’autres sans le contre-balancer pr une référence à l’appel est un choix.
– « Le ton est donné et laisse peu croire à un dénouement pacifique à la rencontre entre les deux mouvements. »
=> n’y aller pas, ne soutenez pas vos idées contre l’extrême droite, de toute façon le contre rassemblement ne peut en aucun cas être pacifique, vous n’avez rien à voir avec ça ! En mentionnant le peu de possibles d’un « dénouement pacifique », SudPresse questionne la possibilité d’une coexistence entre fascisme et antifascisme, sans renvoyer à ce que ces termes défendent comme valeurs, et sous-entend que, cette coexistence serait possible, désirable, renvoyant ainsi une responsabilité égale entre les fascistes et antifascistes … Si des étudiant.e.s en journalisme nous lisent, SudPresse nous explique dans cet article comment donner une vision fréquentable d’un mouvement comme Nation.
Aucune définition dans cet article de ce qu’est Nation, vaguement défini comme « mouvement d’extrême droite ».
Aucune référence :
– à sa revendication de proximité avec Aube Dorée,
– sa participation à l’APF, qui regroupe de partis tels que Aube Dorée, Forza Nuova (Italie), Democracia Nacional (Espagne), Parti national-démocrate NPD (Allemagne), Parti populaire « Notre Slovaquie » (Slovaquie),
– au fait que certains de ses jeunes sont proches de Blood & Honour, des Nationalites Autonomes, et d’autres groupes néonazis,
– au fait que certains de ses jeunes jouent dans un groupe de RAC (Rock Against Communism) qui se produit à des concerts souvent clandestins pour un public revendiqué néonazi,
– au fait qu’ils avaient adhérés au mouvement « troisième voie » de Serge Ayoub, jusqu’à sa dissolution après le meurtre de Clément Méric,
– au tabassage en règle d’un SDF en 2015 par6 membres de Nation, dont un cadre, en marge du défilé hebdomadaire des collectifs de soutien aux sans-papiers à Bruxelles (la section liégeoise de Nation est reprise par une de ces 6 pesonnes)
– au pedigree des fondateurs et cadres de Nation (Jean-Pierre Demol : ancien dirigeant-fondateur du Mouvement social nationaliste (MSN), un groupuscule néorexiste bruxellois, ou encore le président actuel, Hervé Van Laethem qui dirigeait auparavant le groupuscule néonazi « l’Assaut » et se rendait sur la tombe de Léon Degrelle)…
Bref, somme toute, pour SudPresse, Nation n’est qu’un parti « d’extrême droite », expression tellement banalisée depuis la montée du FN.
La portée de l’événement facebook lancé par Veille Antifa Liège est de près de 25000 personnes atteintes en moins de 6 jours, plus de 2000 personnes y ont été invitées (nous avons publié l’événement en y invitant une centaine de personnes) et on n’en compte plus le partages.
Preuve que cet appel ayant été pensé comme large, de nombreuses personnes et collectifs s’y sont reconnus et se le sont approprié.
À aucun moment SudPresse n’y fait référence.
À aucun moment SudPresse ne pose la question de la pertinence d’un tel rassemblement face aux valeurs et actes d’un goupe comme Nation.
À aucun momen SudPresse ne pose la question de savoir pourquoi ce contre rassemblement.
SudPresse fait le choix conscient d’invisibiliser cette réaction.
SudPresse fait le choix conscient assimiler l’antifascisme au fascisme.
Par cette association, SudPresse fait le choix conscient de faire peur aux personnes qui ont l’intention de venir au contre rassemblement. Comme si l’antifascisme n’était question que de gros muscles alors qu’il est populaire et transversal !
SudPresse fait le choix conscient de mettre de l’huile sur le feu (ce qui lui permettra sans aucun doute, plus tard, de faire un bel article disant que les fomenteurs de troubles et violence, c’est mal).
SudPresse fait le choix conscient de donner la parole à Nation et de faire la promotion de sa manifestation.
Aujourd’hui SudPresse a fait le choix conscient de donner un lieu de rendez-vous pour que tous les anti-gauchos, anti-réfugié.e.s / sans-papier / migrant.e.s, défenseurs de la parole raciste et haineuse dans l’espace public sous cuvert de liberté d’expression,… puissent se rencontrer, rencontrer une structure, s’organiser (autrement que dans les commentaires de leurs articles).
On peut d’ailleurs décemment se demander d’où SudPresse tire ses informations.
Ce 30 octobre, jour de rassemblement, l’agenda du site de Nation annonce toujours « Action à Liège, détails suivent. », aucune publication liée à leur manifestation n’est visible ni sur leurs groupes publics, ni sur les groupes et pages publiques que Nation fréquente.
Logique : comme à son habitude Nation se cache, particulièrement à Liège où il lui a fallu plusieurs années avant de reconstituer un semblant de noyau militant. Événements secrets, invitations par mail (pour les recevoir il faut montrer patte blanche et donner toutes ses informations personnelles).
Avec ses actions, le seul objectif de Nation, en fait sa seule capacité objective, n’est pas d’avoir une quelconque influence. La réussite d’une action, pour Nation, réside uniquement dans la communication.
Publier des photos sur leur site et facebook, en espérant ainsi convaincre d’autres personnes de les rejoindre. Et si, en plus, ils peuvent avoir l’un ou l’autre article dans les médias grands publics, ils sont non seulement aux anges de pouvoir briser le cordon sanitaire, mais également de pouvoir recruter dans les commentaires.
Aujourd’hui SudPresse a pris les devant, leur faisant de la pub avant même qu’ils ne se risquent à sortir du bois.
Cela ne nous étonne pas vu ses choix quotidiens d’articles et la manière de les traiter.
La presse n’est pas neutre. Et SudPresse a, depuis longtemps déjà, choisi son camp !
Précisons également qu’à l’initiative le rassemblement était appelé par le Parti des Pensionnés, qui participe à la coordination « on est chez nous / front des patriotes » avec d’autres partis, tels que Nation, mais aussi la N-SA (Nieuw-solidaristisch alternatief (Nouvelle alternative solidariste)).
Le Parti des Pensionnés a choisi d’annuler son événement après l’interdiction du bourgmestre, Nation en reprenant le flambeau et la publicité.
En écrivant ces lignes, nous découvrons un article de « Today in Liège », daté de ce 30 octobre, jour de rassemblement.
Les membres liégeois du mouvement politique Nation, un groupe d’extrême-droite vu comme extrémiste ou fasciste, avaient prévu de se rassembler ce lundi soir 18h dans le centre de Liège à proximité de la place Saint-Lambert. Il s’agissait là d’une réaction à la campagne « Liège, ville hospitalière » ayant notamment pour but la création d’un groupe de réflexion chargé de travailler sur la question de l’accueil et de l’accompagnement des migrants.
L’annonce de ce rassemblement avait alors provoqué certaines réactions et la « manifestation » avait été purement et simplement interdite car elle risquait d’occasionner des troubles de l’ordre public.
« On ira ailleurs »
Contacté par nos soins ce week-end, le mouvement a affirmé vouloir contourner cette interdiction en mettant en avant le droit à chacun de pouvoir s’exprimer librement : « On est en démocratie et on a le droit de dire stop à l’immigration », nous a indiqué notre interlocuteur, « On va quand même se rendre sur place et on va faire comme d’habitude. On va tenter de négocier et si on nous interdit de nous exprimer, on a un plan B … et même un C, on fera quelque chose ailleurs ».
Ce membre n’a pas souhaité nous en dire d’avantage mais il a indiqué qu’il n’était pas dans leur intention de braver les forces de l’ordre ou de chercher la violence.
Ces lignes sont une tribune à Nation. Sans aucunement préciser ce qu’est Nation (si ce n’est un vague « groupe d’extrême-droite vu comme extrémiste ou fasciste » qui laisse la place au doute, le mot « vu » n’étant pas le mot « est », ce qui ‘est pas ici de l’objectivité mais un refus de prendre ses responsabilités), Today in Liège choisi d’aller chercher la parole à ce parti sans prévenir ses lecteurs.
Nation a encore une fois l’occasion de s’y victimiser (et leurs victimes, passées et futures, on en parle ?) et d’y faire sa propre promotion, sans recadrage de la part de Today in Liège. Laisser parler Nation de la liberté d’expression vis à vis de l’anti immigration sans permettre aux lecteurs de savoir qui parle en revient à minimiser Nation à ces quelques mots (les militants d’Aube Dorée, en Grèce, dont Nation se revendique, sont par exemple responsables de meurtres de sans-papiers / migrant.e.s / réfugié.e.s comme de militants antifascistes, responsables d’attaques violentes contre leurs logements,… ).
Notons également que tout cet article est dédié à Nation et qu’il n’y est à aucun moment fait référence au contre rassemblement : si vous partagez les idées de Nation, vous savez où aller, si vous les refusez, vous êtes seul.e., restez chez vous !