Procès pour un militant turc communiste et antifasciste à Liège

Procès d’un militant turc à Liège

Erdal Gökoglu n’est pas une figure inconnue dans la diaspora turque. Cet homme vit en Belgique depuis 2002 et a été reconnu comme réfugié politique en Belgique en 2007. Alors qu’il était étudiant, il fut incarcéré pendant six années de prison en Turquie entre juin 1995 et juillet 2001. En 1999, les personnes suspectées de faire partie de mouvements extraparlementaires communistes, ici le DHKP-C (1), furent torturés dans une geôle turque et dix d’entre eux moururent. Blessé par balle et considéré comme mort, les militaires le “stockèrent” avec les autres cadavres de ses compagnons.
Son parcours durant ces six années est une continuité d’emprisonnement dont certaines de types F, de torture et de grèves de la faim. Vu son état de santé suite aux déprédations, il sera emmené à l’hôpital d’Erdine avant d’être exfiltré par des ami.es vers la Belgique.

Son parcours est en partie similaire à celui du militant Bahar Kimyongür, tous deux ont été arrêtés abusivement par des pays européens malgré l’existence de procès précédents en leur faveur. Régulièrement ils sont de nouveaux arrêtés et jugés suite aux pressions d’Ankara. Erdal Gökoglu avait une précédente fois été arrêté en Pologne (2016) où il avait connu des conditions de détention immondes (enchaîné, amené dans une cage de verre au tribunal…) en attente d’une extradition vers la Turquie pour ensuite être rapatrié en Belgique.

Dernièrement, suite à son passage en Allemagne, l’état allemand a considéré qu’il pouvait dès lors intervenir dans le dossier et a demandé à la Belgique de l’arrêter afin de l’extrader vers la Turquie. Les faits qui lui sont reprochés c’est d’avoir vendus des revues, organisés des concerts et une conférence à l’université de Berlin. S’il est emprisonné depuis le 13 novembre en Belgique, il fut emmené ce mardi 28 au tribunal de Liège menotté à une ceinture spéciale et entouré de huit keufs cagoulés. Le procureur a demandé de suivre la demande d’extradition allemande. La décision est tombée le jour même : la Belgique, après avoir reconnu les tortures et crimes commis par le régime d’Erdogan à l’encontre de Erdal Gökoglu, a décidé de l’extrader vers ce même régime… La défense a décidé de faire appel et la nouvelle audience aura lieu d’ici 15 jours.

L’état turc mène une vaste campagne de pression sur les différents pays européens afin d’extrader des personnes turques et/ou kurdes considérées comme des opposant.es au régime fasciste d’Erdogan. Plusieurs avocat.es dont Selma Benkhelifa, Olivier Stein ou encore Joke Callewaert ont dénoncé plusieurs fois les participations des états européens dans les campagnes d’extradition turque, ou encore les logiques derrière ces extraditions.

Face au fascisme du régime d’Erdogan et la complicité des états européens, nous voulions faire connaître plus largement le cas de Erdal Gökoglu, en n’oubliant pas que derrière quelques figures “médiatiques” il y a une foule d’anonymes qui subissent de telles exactions dans nos pays et ailleurs. Si pour autant nous sommes critiques des idéologies présumées des personnes concernées, nous ne pouvons tolérer les crimes et violences qui leurs sont infligés par les autorités turques et européennes.

1 Le Parti-Front révolutionnaire de libération du peuple, mouvement marxiste-léniniste armé considéré comme mouvement terroriste. Plusieurs belgo-turcs furent soupçonnés par le régime d’Erdogan d’en faire partie comme Bahar Kimyongur ou Fehriye Erdal.

 

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