Une nouvelle personne a trouvé la mort ce 9 octobre 2018 au camp de la honte à Vottem, il s’appelait Gebre. C’est la cinquième personne tuée par ce centre depuis 2008. Sans compter celles qui sont mortes lors ou après leur expulsion ni les nombreuses tentatives de suicide ni celles qui ont été détruites par et pendant leur détention. Cela parce que… elles n’ont pas de papiers (de p-a-p-i-e-r-s). Elle est belle notre ville.
Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées autour du centre fermé le samedi suivant, à l’appel du CRACPE (Collectif de Résistance Aux Centres Pour Etrangers) – qui lutte de manière concrète sur ces “questions” depuis une vingtaine d’années – accompagné de ATTENTION FB six autres collectifs.
Gebre avait 36 ans et se trouvait dans cette prison depuis environ quatre mois. Il est d’origine érythréenne, donc d’un pays en guerre et considéré comme la “Corée du Nord” d’Afrique centrale. Il avait subi une première tentative d’expulsion vers la Bulgarie, pays où il s’était fait agresser à la hache par des racistes et qu’il avait précisément fui. Il voulait se rendre en Angleterre, mais l’État belge s’est mis sur sa route… La Chambre du Conseil avait rendu une ordonnance de remise en liberté vu la situation dans le pays de destination, mais l’Office des étrangers y avait fait appel, comme à sa morbide habitude. Ces incompétents envoient les personnes à la mort, et ils le savent très bien.
Il vient d’ailleurs encore d’organiser une expulsion forcée mardi dernier avec escorte et contrainte dès la première tentative malgré refus. La personne a été emmenée dans une pièce isolée bras liés, yeux bandés et bouche baillonnée jusque dans l’avion.
Les témoignages récoltés par Médecins du Monde (une cinquantaine sur les centaines de cas, en quelques mois) et publiés récemment ne sont qu’une triste preuve de plus que les “défenseurs de la loi” la viole chaque jour avec entrain et s’acharnent ATTENTION FB particulièrement sur les personnes migrantes.
Parenthèse fermée. Le centre fermé de Vottem savait quant à lui que Gebre avait dit qu’il se tuerait plutôt que d’être expulsé. Ils savaient également qu’il était dépressif mais cela ne les a pas empêché de l’isoler dans une chambre seul. Il s’y est pendu.
Pour Freddy Roosemont, directeur général de l’Office des étrangers, c’est presque une anecdote et ce n’est pas lié aux conditions de vie dans le centre, qu’il juge « excellentes ». Pour s’en convaincre on pensera au décès par “overdose de métadonne” administrée ou au décès d’une personne qui s’était automutilée et qu’on a laissé crever pendant la nuit dans son cachot (requalifiée en… “mort naturelle”).
Nous invitons Théo Francken et tous ces sociopathes à vivre quelques années dans un pays en guerre, à subir une attaque ou l’autre à l’arme blanche et ensuite à passer quelques mois dans un tel centre à la politique “ferme mais humaine” (sic).
Plutôt la vie
Le samedi matin du rassemblement un jeune tunisien a escaladé les grillages du centre en signe de protestation et une grève de la faim a été organisée. D’autres actes de solidarité et d’hommage ont eu lieu ailleurs.
Comme à l’accoutumée lors des manifestations de soutien, les personnes enfermées ont été cyniquement privées de balade et déplacées dans des parties plus éloignées du bâtiment. La solidarité ne fait pas bon ménage avec l’enfermement.
Cette manifestation a rassemblé beaucoup de monde. Le cortège était énergique et un maximum de bruit a été fait pour être entendu des personnes enfermées dont certaines ont pu faire des signes. De nombreuses personnes ont donné des coups sur les portes métalliques. Des slogans ont été entonnés : “Liberté, Solidarité !”, “Justice pour Gebre”, “Mawda, Semira, on oublie pas, on pardonne pas”, “Etat, assassin, Francken, assassin”, “No border, no nation, stop deportation”, “Brique par brique, murs par murs, détruisons toutes les prisons !”. La police a provoqué une bousculade à un moment car elle voulait absolument faire descendre une personne qui était montée sur une grille pour être vue des personnes enfermées. Heureusement la réaction des manifestantEs sur place a empêché la police de faire ses conneries (la grille est faite d’entailles).
Les prises de parole ont rappelé à quel point deux mondes sont en train de s’affronter. Le vieux monde des institutions morbides qui provoquent ces morts et cette inhumanité insensée, et le monde en mouvement de toutes les personnes qui vivent en actes leur solidarité. C’est notre seule porte de sortie (et notre plus grande force) face à la barbarie. Nous avons le nombre, utilisons-le contre les rafles dans les bus et trains, contre les centres fermés et les expulsions, pour l’accueil et les coups de main, pour la désobéissance civile et les passages aux frontières.
Gardons également en tête la prochaine manifestation annuelle contre ce camp de la honte à Vottem (elle se passe d’habitude en mars). Ce sera la vingtième année que ce centre tue si on le laisse faire.
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